Les « Ch’tis » : un an après, l’heure des comptes
Au cours d’une de ses visites dans le Nord - Pas-de-Calais, au printemps 2008, en pleine ch’timania hexagonale, Dany Boon a annoncé son intention de faire profiter des associations caritatives de ce triomphe inattendu. Promesse tenue !
Le 3 juillet 2008, Dany Boon et toute l’équipe du film se confrontaient aux redoutables questions de Jean-Pierre Foucault dans le cadre d’un « Qui veut gagner des millions ? » à l’accent ch’ti. Gain de la soirée : 72 000 euros, dont l’humoriste armentiérois assure qu’ils doivent aider à la réalisation d’une maison-relais pour sans-domicile fixe, au pays de Jean Bart. « Nous avons reçu le chèque en septembre, et nous devrions procéder à la pose de la première pierre en mars ou avril », raconte André Thomas, directeur général de l’association d’action éducative et sociale (AAES). Cette structure de 340 salariés, très implantée dans la région dunkerquoise, monte ce projet depuis quelques années, avec le soutien de la communauté urbaine de Dunkerque et du promoteur social ARELI. Budget total : 1,4 million d’euros. Il s’agit de construire un bâtiment d’un étage, à Petite-Synthe, doté de vingt logements individuels et de salles communes, avec présence éducative sur place.
Dès 2003, Dany Boon, en tournée à Dunkerque, avait été sollicité par AAES. Banco ! L’artiste a permis à des SDF d’assister à certains de ses spectacles, à l’Olympia. « Et il a continué à jouer son rôle, poursuit André Thomas. Les 72 000 euros vont nous permettre de meubler la maison-relais. »
Et le « Ch’ti fonds » ?Autre annonce de Dany Boon : la volonté de reverser les bénéfices de la vente des produits dérivés du film à des associations caritatives.
Pour ce faire, le réalisateur a signé en juin 2008 un accord avec Pathé, le distributeur, et la Fondation de France. Le « Ch’ti fonds » est créé.
En coulisses, les choses ont avancé. « Nous travaillons à la répartition des fonds, assure Dominique Lemaistre, directrice du mécénat à la Fondation de France. Sachant que nous avons commencé à en distribuer au moment de Noël, au bénéfice des Restos du Coeur, du Secours populaire français, de la Fondation Abbé-Pierre, de la Fédération nationale d’accueil et de réinsertion sociale, et de Sidaction. » La Fondation reste discrète sur les sommes (« Nous ne voulons pas créer d’illusions »), mais selon nos sources, 750 000 euros ont été distribués en décembre. Et ça n’est pas fini. « Plein de gens ont appelé le “Ch’ti fonds”, poursuit Dominique Lemaistre. Nous avons demandé des dossiers à une série d’associations. Nous organisons les choses, en liaison avec Dany Boon et Pathé. À la fin, tout sera communiqué de manière transparente. » La Ferme du major, à Raismes, fait partie des structures à qui la Fondation a demandé un dossier, tout récemment. « Ça arriverait à point nommé,confirme Réjane Régnier, la directrice de cette association de réinsertion sociale et professionnelle pour les jeunes de 18 à 26 ans. Nous avons des projets : la création d’un gîte et la réhabilitation d’un hangar agricole pour accueillir des scolaires. » Une aide signée Dany Boon ? « C’est un facteur positif pour notre public, qui a besoin d’être tiré vers le haut. » Les choses sont également toujours en cours du côté de Solidarité Avesnois, créée pour venir en aide aux sinistrés de la tornade du mois d’août. « Comme d’autres, nous ferons partie de la cagnotte des produits dérivés, explique Emmanuel Riglaire, avocat et
trésorier de l’association.
Les bénéfices de plusieurs projections de Bienvenue chez les Ch’tis ont également été reversés. Et la présence de Dany Boon, sur place en septembre dernier, a donné une lisibilité à notre démarche, comme un gage de confiance et de désintéressement. C’est précieux pour nous. Je sais aussi qu’il a sensibilisé Claude Berri. » Ce dernier, lui aussi producteur des Ch’tis, disparu depuis peu, avait envoyé un chèque de 100 000 euros à Solidarité Avesnois.
REPÈRES> En France : 120 ME de recettes.- Un an après sa sortie, « Bienvenue chez les Ch’tis » culmine à plus de 20 456 000 entrées (20,7 millions pour « Titanic », mais n’insistons pas…). Il a engrangé des recettes de plus de 120 millions d’euros, rien que dans l’Hexagone. Pour un budget initial d’environ 14 millions d’euros, voilà un taux de rentabilité qui crève l’écran ! Entre ses cachets de scénariste, réalisateur et comédien, un pourcentage sur les recettes et quelques clauses opportunes sur ses contrats, l’Armentiérois bénéficierait d’une manne d’au moins 15 millions d’euros.
> À l’étranger : 30 ME de recettes.- Dans la foulée de la France, « Bienvenue chez les Ch’tis » est sorti en Belgique : 1,1 million d’entrées. On dépasse les 700 000 entrées en Suisse. En Italie, Dany Boon a rassemblé plus de 500 000 spectateurs avec « Giu al Nord » (troisième au box-office la semaine de sa sortie, en octobre). « Wilkommen bei den Sch’tis » a attiré plus de 140 000 spectateurs allemands le week-end de sa sortie, en octobre également (deuxième du box-office) et a poursuivi une formidable carrière. À la
fin décembre, on approchait le million d’entrées. Beau parcours en Autriche et au Portugal. En ce moment, l’exploitation du film débute en Espagne : plus de 200 000 entrées en deux semaines, si l’on en croit nos confrères du « Film français », avec la meilleure moyenne par copie du top espagnol. Unifrance, organisme chargé de promouvoir le cinéma français à l’étranger, estime à 4,7 millions le nombre de spectateurs qui ont succombé à la ch’timania en dehors de nos frontières. Pour des recettes flirtant avec les 30 millions d’euros.
> DVD : le Titanic est vaincu !- En tout 2,9 millions de DVD de « Bienvenue chez les Ch’tis » se sont arrachés depuis sa sortie, le 29 octobre (sur un tirage qui, au fil des réassorts, a atteint 3,6 millions d’exemplaires). Les 2,8 millions de cassettes VHS estimées de « Titanic » sont donc coulées ! Pour la petite histoire, 15 000 cassettes vidéo des « Ch’tis » ont également été vendues (sur un total de 20 000). Première diffusion télévisée le 13 mars, sur Canal+.
ZOOMSon prochain film : « Bienvenue chez les douaniers » ?Après La Poste, Dany Boon pourrait s’inspirer du monde de la douane pour planter l’intrigue de son prochain long métrage. Ce qui est sûr, c’est que l’artiste est venu partager un moment de convivialité avec des douaniers de la métropole lilloise, non loin de la frontière belge, voici quelques semaines. Il semblerait que cette éphémère immersion ait eu pour objectif de flairer des anecdotes propices à enrichir un scénario en gestation. Dans le milieu des douanes, on observe le plus grand mutisme quant à cette visite. Même si, sur le fond, l’idée semble « a priori » intéressante. Jean-Yves Mahé, directeur interrégional des douanes et historien dans l’âme, évoque une « partie du patrimoine historique de la région, dont on parle encore ici avec émotion ». Surtout s’agissant de l’époque précédant la libre circulation des marchandises, en 1993. Et de citer la disparition des postes-frontières servant au dédouanement des marchandises, la petite fraude au quotidien, ou encore ces cafés installés près de la frontière et « où se croisaient le fraudeur et le douanier ». Une « histoire d’amour avec la frontière » qui s’est écrite pendant des décennies… Le nom de Benoît Poelvoorde a commencé à circuler pour figurer dans la distribution.
Article de La voix du Nord
